LA VOIX DU NORD 9 mars 2014
Parmi les personnalités arrageoises exhumées de l’oubli il y a quelques années par le passionné Raymond Besson, décédé en février 2012, figurait Violette Leduc, une écrivaine, contemporaine des grands penseurs et littérateurs de l’après-guerre (Sartre, de Beauvoir, Genet). La chaîne culturelle Arte réhabilite ce petit bout de femme à travers un film d’Esther Hoffenberg qui sera diffusé le 12 mars, à 22 h 45. Mais qui était donc cette « scandaleuse » romancière, née à Arras en 1907 ?
Mais qui était donc cette « emmerdeuse » dont parlait Jean Genet, cette « femme laide » décrite par Simone de Beauvoir, qui lui reconnaîtra pourtant du talent à la lecture de L’Asphyxie, publié en 1946 ? Un style percutant, des phrases courtes, un sens certain, voire brutal, de la métaphore : elle aura finalement trouvé un style et fait de sa vie la matière de ses écrits.
Une vie loin d’être rose bonbon, où la sexualité et les sentiments sur lesquels elle ne se lassera pas d’écrire auront été ses affres, voire même les stations de son calvaire. Cette fille qu’un père ne reconnaîtra point, cette jeune fille troublée et séduite par une surveillante du collège de Douai, ses amours pour des hommes qui préféraient les hommes, son avortement, l’insatisfaction… auront été l’encre avec laquelle elle aura troublé des milliers de ses contemporains.
Simone de Beauvoir censura elle-même certains passages de L’Asphyxie et se lassa de cette femme intrusive qui la harcelait. La mal aimée fut marginalisée. Elle finira ses jours dans le Vaucluse, à Faucon, le 28 mai 1972, au milieu des objets et des peluches auxquelles elle faisait la conversation.
Un combat : celui de Raymond Besson
De cette pauvre femme, Raymond Besson voulait raviver la mémoire. Retraité de la SNCF et passionné d’histoire, l’homme avait bataillé ferme pour évoquer l’histoire des Serbes de Liévin, des protestants de Wanquetin, avec la collaboration de l’enseignante Arlette Fleurquin. Il s’était ensuite attaqué à cette oubliée d’Arras, à laquelle il consacra un colloque où furent invités les spécialistes de cette écrivaine qu’on présente comme une vrai féministe. Cela nous ramène à 2007, l’année du centenaire de sa naissance, à la médiathèque, en compagnie de Carlo Jansiti, René de Ceccatty, Mireille Brioude…
Le mois de décembre de cette année-là, l’hôtel de Guînes était ouvert pour l’exposition présentée avec le Quai de Batterie, qui donna lieu à l’édition d’un livre d’artiste créé par Luc Brévart. Enfin, modeste aboutissement de ce combat « bessonien », une plaque allait être apposée sur le mur de la maison ou naquit l’écrivaine, dans les hauts de la rue de Saint-Aubert (près du Wetz-d’Amain). Raymond Besson allait ensuite s’intéresser aux oubliés d’Arras (Jean de Rely, Gonsse de Rougeville…) qu’il aura contribué à sortir de la naphtaline.